Le changement climatique n’est plus un avenir lointain. C’est la réalité d’aujourd’hui. Il affecte déjà notre vie quotidienne. La canicule de juin – heureusement passagère – nous l’a rappelé de manière brutale. Pour certaines personnes, les conséquences du changement climatique les poussent déjà à quitter leur environnement dégradé et à traverser des frontières à la recherche d’une vie sûre et digne.

Nous considérons souvent le terme «réfugié» comme une catégorie lointaine à laquelle nous appartiendrons jamais. Être un réfugié est plus que souvent associé à l’«Autre». Pourtant, chacun d’entre nous peut devenir réfugié. Ce n’est pas quelque chose que vous êtes, mais quelque chose que vous subissez. Et le changement climatique nous le subissons tous – même si certains sont aujourd’hui plus touchés que d’autres.

Qu’en est-il des déplacements liés au changement climatique ? Qui sont les réfugiés climatiques? Quelles mesures sont mises en place pour les protéger ? Voici 5 choses à connaître sur l’un des défis les plus urgents de l’humanité.

#1 Les réfugiés climatiques ne sont pas... des réfugiés

Revenons aux bases. Que signifie le terme «réfugié» ? En vertu du droit international, un réfugié est une personne qui, en cas de retour dans son pays, craint « avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe ou de ses opinions politiques ».

Êtes-vous persécuté pour une de ces raisons ? N’êtes-vous donc plus en mesure de vivre en sécurité dans votre pays d’origine ? Si oui, votre pays d’accueil doit vous accorder le statut de réfugié et vous protéger. Et vous ne pouvez en aucun cas être renvoyé dans un endroit où vous risquez d’être persécuté, torturé ou de subir un traitement cruel ou inhumain (c’est ce qu’on appelle le principe de non-refoulement). Les pays d’accueil doivent protéger les réfugiés non pas par générosité, mais par obligation légale (et, espérons-le, morale). 

Qu’en est-il des personnes déplacées de force par des facteurs environnementaux ? Selon la définition officielle, les environnements dégradés ou les catastrophes liées au changement climatique ne sont pas des agents de persécution. Par conséquent, les personnes déplacées de force par des facteurs environnementaux ne sont pas, par définition, des réfugiés. Néanmoins, une définition établie en 1951 est-elle adaptée aux réalités actuelles de déplacement forcé ? Sans reconnaissance, ces personnes ne bénéficient pas de protection internationale. Alors que les conséquences du changement climatique déplacent de plus en plus de personnes, il n’existe toujours pas d’accord international sur la gestion de cette réalité prédite et désormais bien tangible. 

Alors, quel terme utiliser ? Migrant climatique ou réfugié climatique ? Bien que catégoriquement incorrect, employer le terme de réfugié climatique, c’est croire que toute personne souffrant des conséquences du changement climatique a le droit d’être protégée – surtout lorsque cette dégradation est le résultat d’(in)actions de l’homme. 

#2 Les déplacements climatiques sont causés par deux types de catastrophes

Les catastrophes climatiques soudaines provoquent des perturbations immédiates et brutales. Il s’agit d’événements tels que les ouragans, les incendies de forêt, les inondations, les tremblements de terre, les tsunamis, les éruptions volcaniques etc. Lorsque ces événements se produisent, les personnes affectées ont tendance à migrer au sein de leur propre pays. 

Les catastrophes à évolution lente ne sont pas causées par un événement unique. Lentement mais sûrement, les gens sont poussés vers une détresse croissante et au-delà de leurs capacités normales d’adaptation. Elles comprennent les sécheresses qui déclenchent des situations d’insécurité alimentaire ou la désertification et l’élévation du niveau de la mer qui réduisent les terres habitables et les moyens de subsistance viables. Les îles du Pacifique, comme Tuvalu ou Kiribati, sont un exemple frappant de catastrophes climatiques à évolution lente: ces îles disparaissent lentement sous la mer.

© UNDP Tuvalu / Aurélia Rusek

#3 Les réfugiés climatiques proviennent principalement des régions qui contribuent le moins au changement climatique

L’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique Latine sont les régions les plus touchées par le changement climatique. Les régions en développement, insuffisamment équipées et qui ont souvent le moins contribué au réchauffement de la planète sont celles qui souffrent le plus des conséquences du changement climatique – et des défis sociaux, économiques et sécuritaires qu’il implique. 

Les statistiques sont stupéfiantes. Entre 1990 et 2015, les 1% les plus riches de la population mondiale ont été responsables de 15% des émissions de carbone, soit près de deux fois plus que les 50% les plus pauvres de la planète, qui ont été responsables que de 7%.

La justice climatique consiste à responsabiliser les Etats dont les émissions de carbone ont transformé les terres des réfugiés climatiques. Cela ne requiert pas seulement des efforts pour réduire les émissions et limiter le réchauffement de la planète, mais aussi combler les écarts de développement, restaurer les écosystèmes dégradés et aider les populations à s’adapter dans les régions les plus affectées

Les déplacements climatiques sont loin d’être ou de devenir une crise propre à ces régions du monde. Par exemple, l’élévation du niveau de la mer menace de déplacer des populations en Europe du Nord. Le changement climatique n’épargne personne. Mais certains sont bien mieux équipés pour y faire face. 

#4 80% des personnes déplacées par le changement climatique sont des femmes

Le changement climatique n’est pas neutre sur le plan du genre. Pourquoi les femmes sont-elles plus vulnérables face au changement climatique ?

Tout d’abord, les femmes sont moins susceptibles d’être impliquées dans les décisions concernant la prévention, l’atténuation et la gestion du changement climatique. Cela signifie que les perspectives et problèmes spécifiques au genre ne sont souvent pas pris en compte – augmentant ainsi l’exposition à des risques souvent évitables. 

Deuxièmement, dans les pays à faible revenu, les femmes et les jeunes filles sont souvent chargées de l’agriculture de subsistance et sont les principaux fournisseurs de nourriture, eau et combustible. Elles sont donc les premières à subir les effets de conditions météorologiques extrêmes et irrégulières et de la pénurie de ressources. Comme les mères ont de plus en plus de mal à fournir de ressources, les filles sont souvent obligées d’abandonner l’école pour les aider. 

Les femmes déplacées par le changement climatique sont également exposées à un risque accru de violence basée sur le genre, notamment violence domestique, violence sexuelle, mariage forcé et précoce et traite d’êtres humains. 

Le changement climatique est une vraie menace pour le développement mondial et l’égalité des genres. Les réponses aux conséquences du changement climatique doivent tenir compte des questions liées au genre pour aider à renforcer la résilience des communautés touchées et réduire le besoin de se déplacer. 

#5 Il est difficile de dire combien de personnes seront déplacées par le changement climatique

Le déplacement climatique n’est pas un phénomène nouveau. Il a lieu (littéralement) depuis la nuit des temps. Les facteurs environnementaux ont toujours influencé la répartition des humains dans le monde. Ce qui est nouveau, c’est le rythme accéléré de ces déplacements climatiques. 

Mais il est difficile d’estimer le nombre de personnes qui se déplacent aujourd’hui ou à l’avenir en raison de facteurs environnementaux. D’une part, les raisons de la migration sont souvent mêlées. Les facteurs de stress climatique s’ajoutent souvent aux conflits, à l’instabilité politique, au développement économique fragile et aux violations des droits de l’homme. Le lien de causalité direct entre les facteurs environnementaux et les déplacements n’est pas toujours évident. En fait, il existe rarement une raison unique pour laquelle les gens décident de quitter leur foyer. D’autre part, les déplacements climatiques se produisent la plupart du temps au sein d’un même pays plutôt qu’à travers des pays – et ce mouvement n’est pas souvent officiellement documenté. 

Néanmoins, voici quelques chiffres et prédictions. En 2020, les catastrophes environnementales ont forcé plus de 30.7 millions de personnes à se déplacer – deux fois plus que les déplacements causés par les conflits et la violence. 

New displacements in 2020: Breakdown for conflict, violence and disasters / IDMC

L’Institut pour l’Économie et la Paix estime que, d’ici 2050, 1.2 milliard de personnes ne seront pas en mesure de s’adapter aux effets du changement climatique et seront donc susceptibles de migrer. Avec une population mondiale estimée à 9.8 milliards en 2050, cela signique que 12% de la population mondiale seront des réfugiés climatiques

Les déplacements climatiques ne sont pas inévitables. L’action collective et immédiate pour aider les régions affectées à s’équiper et à atténuer les effets du changement climatique est décisvie pour réduire ces déplacements climatiques. C’est ensemble ou rien.